Ratifier les conventions régionales dont la Convention de Malabo sur la cybersécurité. C’est ce à quoi le Congo a convié les pays africains au sommet de Lomé sur la cybersécurité. Léon Juste Ibombo, Ministre des postes, des télécommunications et de l’économie numérique du Congo analyse l’enjeu pour la cybersécurié des Etats. Il insiste, au micro de Cio Mag, sur les actions urgentes à entreprendre après le sommet tenu les 23 et 24 mars à Lomé.
Cio Mag : Qu’est-ce que la ‘’Déclaration de Lomé’’ devrait apporter dans la protection du cyberespace africain ?
Léon Juste Ibombo : La Déclaration de Lomé est un instrument qui permettra aux chefs d’États et de gouvernements d’intégrer le volet économie numérique dans leurs axes prioritaires. C’est aussi une déclaration pour pousser les Etats à ratifier la Convention de Malabo qui est l’instrument pertinent de l’Union Africaine. Nous avons cet instrument pertinent qui, malheureusement, n’est pas encore applicable parce qu’il n’y a pas encore assez d’Etats qui l’ont ratifié. Il manque encore deux Etats pour que cet instrument puisse être opérationnel. Donc, la ”Déclaration de Lomé” est quand même un appel considérable parce qu’elle est une prise de conscience au plus haut sommet des Etats.
Qu’il vous souvienne que nous avons connu la Covid-19. Avec cette pandémie, nous avons vu l’importance du numérique. S’il n’y avait pas eu le volet numérique dans les politiques, il n’y aurait pas par exemple la poursuite de l’éducation, il n’y aurait pas eu par exemple le soutien de l’Etat aux plus fragiles. Pour le cas spécifique du Congo, nous avons pu apporter ce soutien à travers les mobiles monnaies, à travers les opérateurs de téléphonie mobile. Le volet numérique est très important pour les États et il ne peut être intégré sans prendre les mesures nécessaires pour la sécurité numérique. C’est cela le but de cette ‘’Déclaration de Lomé’’.
Dans la coopération africaine pour agir ensemble contre les cybermenaces, quel rôle le Congo entend jouer ?
La protection du cyberespace est une question majeure. Aujourd’hui, on parle de la gouvernance électronique. Ce qui suppose que nous devons avoir les instruments nécessaires pour protéger notre cyberespace. Ceci dit, l’engagement du Congo est ferme. Comme j’ai l’habitude de le dire, nous parlons des autoroutes de l’information et de la communication. Prises comme telles, il y a plusieurs usagers qui utilisent ces autoroutes. Et, comme il y a plusieurs usagers, il faut qu’il y ait une réglementation et des panneaux de signalisation. A côté des panneaux de signalisation, il faut un gendarme de sorte que lorsque il y a un usager qui enfreint la réglementation, qu’il soit réprimé.
Dans un autre sens, nous sommes dans un cyberespace commun et il faudrait qu’il y ait une coopération parce que nous ne savons pas d’où peuvent venir les attaques. Je pense donc que le sommet de Lomé vient pour une prise de conscience au niveau africain ; pour nous rappeler que nous devons agir ensemble pour pouvoir protéger notre cyberespace, mais aussi pour ne pas rater la 4ème révolution. Le Congo est donc disposer à accompagner cette dynamique et à apporter sa pierre à l’édifice.
Quelles actions urgentes les Etats devraient-ils engager après ce sommet de Lomé ?
Première action, que les États qui n’ont pas encore ratifié la convention de Malabo puissent le faire. Tant que nous n’avons pas une collaboration au niveau panafricain, comment pourrions-nous aller vers une collaboration au niveau mondial ? Parce que il y a justement la convention de Budapest – c’est à dire la convention de l’Union européenne sur la cybercriminalité -. Mais si vous voulez ratifier la convention de Budapest alors que vous n’avez pas encore ratifié celle de Malabo qui est notre propre instrument, il y a quand même un problème.
Deuxième engagement, nous devons tisser des partenariats publics-privés. Ceci, en raison du fait que le sommet de Lomé s’est déroulé avec le concours de la Commission économique des Nations-Unies pour l’Afrique (CEA). Et au-delà de la CEA, nous avons vu que, par exemple, à Lomé, l’expérience assez particulière qu’il y a eue. Les acteurs ont mis en place un organe de lutte et d’alerte contre la cybersécurité mais en partenariat avec le secteur privé. Et puisque les investissements dans le secteur du numérique sont assez colossaux, il faut réfléchir à comment, grâce aux partenariats publics-privés, nous pouvons les amortir.
Comment les acteurs de l’écosystème du numérique africain et congolais en particulier pourraient contribuer ensemble à la protection du cyberespace du continent ?
Par une prise de conscience collective ! Avec le numérique, les cyberattaques peuvent venir de partout. Pour le cas spécifique du Congo, nous avons eu une banque de la place qui a été cyberattaquée. Et donc, s’il n’y a pas une franche collaboration à l’échelle régionale et internationale, c’est très difficile de pouvoir s’en sortir.
Mais avant tout, et j’insiste : il faut que tous nos Etats ratifient la convention de Malabo. Aussi, – puisque le Congo assure la présidence de l’Alliance Smart Africa -, j’invite donc les autres Etats à intégrer cette Alliance, mais aussi le comité technique spécialisé de l’Union africaine. Nous avons ces instruments qui existent justement pour qu’il y ait une mutualisation de nos efforts au niveau des Etats, mais aussi pour qu’il y ait une collaboration entre les États.